Il était temps d’analyser X = Y, une des photos qui ont fait connaître Nath-Sakura à l’international, avec l’excellente modèle et photographe Gwenperoratriz dans le rôle titre. Et une sculpture de l’incroyable Dann Chetrit comme accessoire.
Comme toujours, la compréhension de l’une des images de notre photographe commence par une simple description…
Une femme, le visage incroyablement maquillé, les yeux tellement grands qu’ils semblent faux, comme ceux d’une poupée. Son expression est ambiguë. Elle a les mains dans le dos, comme si elles étaient attachées. Derrière elle, un homme, musclé, tient devant l’entrejambe de la jeune femme une sculpture de marbre, représentant un sexe féminin encordé. Pourtant, au premier regard, on a l’impression que c’est la modèle qui tient la sculpture.
Nous vous proposons deux lectures de ce cliché. Mais le lecteur en trouvera certainement encore beaucoup d’autres…
On peut y voir l’oppression d’une société machiste, où les hommes, tapis dans l’ombre, ne se mettent pas en scène, et présentent les femmes comme des objets. D’où l’impression factice du visage et de l’expression de la jeune femme, où l’on peut entrevoir comme un sourire désabusé. Le sourire de Jeanne d’Arc devant le bûcher. Des hommes qui décident et contrôlent ce que « doit être » l’image des femmes. Ici, avec l’image d’une vulve emprisonnée, contrainte par une corde…
Combien de fois, justement, des hommes, ont-ils dit à Nath-Sakura que certaines de ses photos « nuisaient à l’image de la femme » . Comme si celles-ci étaient, une fois pour toutes, sans espoir, cantonnées au rôle de mère, de fillette ou de sainte. Et qu’elles n’étaient pas libre d’être ce qu’elles veulent. Quand, de l’autre côté, publicitaires et photographes de mode, les enferment dans des impératifs catégoriques de minceur, de jeunesse, de « look », de blondeur. Où une femme qui n’est pas belle, au sens masculin du terme, est bonne pour le rebut.
L’autre lecture est plus « sakurienne ». Les filles de contrebande, dont tout l’avenir repose entre les mains d’équipes médicales, de psychiatres et de chirurgiens, toutes anonymes et interchangeables, vivent longtemps dans un univers factice et schizophrénique. Où l’apparence demeure une quête, souvent hasardeuse, et où l’hyper-féminité s’avère être une erreur. Comme ici, le maquillage outrancier de Gwen. Une quête, où les équipes médicales, désireuses de se débarrasser du plus grand nombre de candidates, repoussent la date fatidique de la libération. Et où un vagin, n’est encore qu’une idée. Comme une image de marbre. Et où tout l’espoir, l’horizon, tient dans l’attende du moment où les cordes vont enfin tomber…